Accélérer la sobriété
Après en avoir appelé à la responsabilité de chacun en matière de consommation d’eau, un « Ecowatt » de l’eau devrait être mis en place dès le début de l’été prochain. Mais si ! Vous savez ? Cet instrument qui avait été mis en place pour surveiller et réduire la consommation d’électricité pendant l’hiver. Le consommateur se verra ainsi alerté sur les tensions hydriques afin de fermer le robinet au moment opportun.
En parallèle, il est demandé à tous les secteurs économiques la mise en place d’un plan de sobriété. Le président a également annoncé des aides pour soutenir les particuliers et les bâtiments publics à s’équiper de récupérateurs d’eau de pluie.
Lutter contre les fuites
Par ailleurs, et il faudrait peut-être en commencer par-là, il s’agira également de réparer les nombreuses fuites responsables d’une importante perte d’eau à l’échelle nationale à l’aide de nouveaux investissements : environ 1 litre sur 5 serait bêtement perdu de cette manière. Dans certaines collectivités, le bilan serait sans appel : plus d’un litre sur deux serait ainsi gaspillé 😱. Si l’on en croit les chiffres de l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement et de l’Office de la biodiversité (OFB), plus de 937 millions de mètres cubes d’eau auraient ainsi été perdus sur l’année 2020, soit la consommation annuelle d’environ 18 millions d’habitants.
En cause, un réseau vétuste et hors d’âge : d'après l'Office français de la biodiversité et l'Inrae, 60% du réseau français a été posé après les années 1970, soit il y a environ 50 ans. Usure des joints, corrosion, mouvement des sols aggravés par la sécheresse, pression élevée de l'eau… Des travaux de grande envergure quand on sait que sur l'ensemble du territoire français, le réseau d'eau potable représente 900 000 km de canalisations.
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La parenthèse gênante sur les centrales nucléaires
Sont aussi pointées du doigt par le Président les centrales nucléaires, 3èmes consommatrices d’eau en France du fait de la nécessité de refroidir leurs réacteurs à l’aide de grandes quantités d’eau. Le Chef de l’Etat évoque une nécessaire adaptation de ces dernières aux nouvelles problématiques présentées par le réchauffement climatique, en leur permettant de fonctionner davantage en circuit fermé.
Une déclaration du Président qui a provoqué la stupeur des spécialistes et scientifiques 🤔: en effet, une centrale en circuit ouvert rejette toute l'eau qu'elle prélève dans l'environnement, et de ce fait, n’en consomme pas. En revanche, un circuit fermé provoquera une évaporation d’une partie de l’eau prélevée. Néanmoins, passer en circuit fermé pourrait permettre d’adapter le parc à la baisse progressive du débit des fleuves et rivières, et d’éviter de rejeter dans de plus petits volumes une eau réchauffée de plusieurs degrés en mettant en péril les écosystèmes. Moyennant des investissements colossaux, alors qu’aucun plan d’investissement n’est pour l’heure prévu en la matière... Il semblerait donc qu’un petit approfondissement soit nécessaire sur ce point.
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La réutilisation des eaux usées
De même, des techniques de réutilisations des eaux usées traitées devraient être développées, notre pays accusant un net retard en la matière par rapport à d’autres, de manière à atteindre 10 % de réutilisation de ses eaux usées, contre moins de 1 % aujourd’hui. L’idée serait donc de récupérer l’eau qui sort des stations d’épuration pour arroser les champs et les espaces verts.
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Et l’agriculture, dans tout ça ?
🚜 Côté agriculture, secteur qui absorbe près de 60% de l’eau consommée chaque année en France, le Président souhaiterait maximiser la capacité de notre principal outil de stockage de l’eau : nos sols. Cela suppose de planter davantage d’arbres et de haies, de manière à favoriser ce stockage naturel et l’approvisionnement des nappes souterraines, bonne nouvelle 🤗 ! 👉 Pourquoi les arbres sont si importants au juste ?
Un secteur sous haute tension du fait des interdictions d’irrigation ayant causé des baisses de rendements de 10 à 40 % l’été dernier… La plus grosse consommatrice en eau en a pourtant cruellement besoin. C’est pourquoi aucun effort supplémentaire ne sera demandé à la production agricole en baissant encore davantage les volumes qu’elle prélève.
Par ailleurs, la réduction de l’usage des pesticides par les agriculteurs devrait permettre également une moindre pollution de nos réserves en eau, notamment dans les retenues artificielles, des méga citernes encouragées par le gouvernement alors même qu’elles provoquent une importante polémique. En effet, l'eau de ces bassines est pompée directement dans les nappes phréatiques ou dans les cours d'eau, durant la période hivernale, ce qui est perçu par beaucoup comme un accaparement de l'eau par l'agro-industrie susceptible d’entraîner une déperdition de la ressource due à l'évaporation. L’été dernier, des dérogations accordées par l’Etat avaient permis à certains agriculteurs raccordés à un stockage d’eau d’irriguer leurs cultures, tandis que ceux qui n’avaient pas cette chance n’ont pas pu arroser 😠.
Mise en œuvre d’une tarification responsabilisante
Le plan prévoit également la généralisation d’une tarification progressive de l’eau, le prix du mètre d’eau se verra donc augmenté significativement au-delà d’un certain niveau de consommation. Prendre une douche ne devrait en effet pas coûter aussi cher que de remplir sa piscine ou d’arroser sa propriété afin de conserver un gazon vert en toutes circonstances 🙄. Dissocier l’eau essentielle, l’eau utile et l’eau de confort, avec l’application de 3 tarifs croissants, vise à instaurer un dispositif de justice sociale et écologique.
Pour toutes ces raisons, le budget des Agences de l’eau sera augmenté de 500 millions d’euros par an, tout en supprimant le plafond de leurs dépenses. Les moyens financiers seront-ils à la hauteur des enjeux ?
Des engagements insuffisants
Pour les organisations environnementales, c’est la douche froide. Elles dénoncent des engagements très insuffisants face à l’importance des enjeux. Le Président oublierait, selon eux, de voir dans l’eau une ressource et des écosystèmes à protéger, omettant complètement d’aborder la question de la protection des milieux aquatiques de la pollution et de l’artificialisation qui les met en péril 🐟. 👉 Pollution marine, la comprendre pour bien agir
Par ailleurs, le fait de ne pas demander de nouvel effort à l’irrigation, qui utilise près de 80% de l’eau disponible en été, fait grincer les dents, notamment quand il s’agit d’arroser le maïs 🌽, plante tropicale inadaptée à nos climats. Par ailleurs, d’après Que Choisir, les 130 millions d’euros promis par le Président aux agriculteurs pour promouvoir une agriculture économe en eau et non polluante ne représente qu’1% des aides de la PAC, autant dire une goutte d’eau dans l’océan : une enveloppe totalement insuffisante à la transition vers une agriculture plus durable. L’agriculture intensive a de beaux jours devant elle.
À retenir :
Le Plan Eau récemment présenté par le chef de l’Etat vise à améliorer la gestion de l’eau en France et à une plus grande sobriété, dans un contexte où le réchauffement climatique progressant, les canicules et les sécheresses deviennent la norme. Les experts évaluent en effet entre – 10 et – 40% la disponibilité en eau dans les prochaines décennies, un énorme chalenge à relever pour éviter les pénuries locales de cette ressource vitale. Un « Plan Eau » qui paraît, aux yeux de nombreux observateurs, partiel et timoré au regard des enjeux.
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Sources : huffingtonpost.fr, francebleu.fr, lepoint.fr, theconversation.com, vie-publique.fr, reporterre.net, quechoisir.org, midilibre.fr
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