Planter des arbres pour sauver la planète, est-ce si simple ?
Certains scientifiques l’affirment sans nuance : planter des millions d’hectares d’arbres dans le monde constituerait l’instrument le plus efficace et le plus économique pour lutter contre le changement climatique. Néanmoins, il faut également relever que les forêts, si elles stockent effectivement du CO2, ne le font pas indéfiniment 🌳. En France, notamment, mais également un peu partout sur la planète, la mortalité des arbres augmente inexorablement en raison des sécheresses qui se multiplient, et de la prolifération des ravageurs. Or, si un arbre en bonne santé remplit son rôle de puits de carbone, un arbre qui dépérit perd une bonne partie de sa capacité à absorber le CO2, et un arbre qui meurt, lui, restitue le CO2 qu’il avait préalablement stocké…
👉 Pourquoi les arbres sont si importants au juste ?
Les forêts Françaises, ces puits de carbones qui déraillent
De ce fait, il s’avère que les forêts, en France, absorbent déjà deux fois moins de CO2 qu’il y a seulement 10 ans, et pourraient même finir par relâcher plus de CO2 qu’elles n’en stockeront à l’horizon 2026 😱. En cause, une exploitation plus importante des couverts forestiers notamment pour produire du bois de chauffage, et la mortalité des arbres qui est en forte augmentation, du fait des sécheresses, et des ravageurs de type insectes (comme le hanneton forestier qui profite du réchauffement climatique pour proliférer), champignons (à l’image de la chalarose du frêne, un champignon qui nous vient d’Asie), ou bactéries qui prolifèrent, affaiblissant les jeunes arbres. Les tempêtes et incendies ont fait le reste…
De fil en aiguille, la capacité des forêts à absorber les émissions excédentaires de CO2 décline, et menace de s’effondrer. C’est déjà le cas des forêts des Hauts-de-France, du Grand Est et de la Corse, qui sont devenues émettrices de CO2 🥺. Ainsi, alors que les forêts françaises absorbaient plus de 70 millions de tonnes de CO2 en 2008, cette quantité n’était plus que de 27 millions de tonnes en 2022, d’après les chiffres du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa). C’est en partie la raison pour laquelle la France n’a pas respecté sa Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) en 2022. C’est un problème de taille, dans la mesure où notre pays compte fortement sur les forêts pour atteindre ses objectifs de neutralité carbone d’ici 2050. Un constat difficilement compréhensible, quand on sait que la superficie des forêts s'accroît continuellement dans l’hexagone depuis les années 80 🤔.
👉 Des arbres dopés pour capter plus de CO2 : les OGM en renfort ?
Les raisons d’un dangereux déclin
En premier lieu, la disponibilité en eau conditionne la capacité de capture du CO2 par les arbres : moins il y a d’eau, moins ils stockent de CO2. Autrement dit, le stress hydrique est très mauvais pour le climat. La sécheresse, de plus en plus fréquente, met ainsi à mal nos précieux puits de carbone, ce qui aggrave le réchauffement climatique, et favorise la multiplication des épisodes de canicule 🙃 … C’est en effet la transpiration des feuilles des arbres qui permet la photosynthèse, et donc la fixation du CO2 par la plante. Un cercle particulièrement vicieux ! 👉 Sécheresse : quelles conséquences ?
Du côté de l’entretien des forêts, une tendance consiste par ailleurs à couper les plus vieux arbres, qui sont en fait encore adolescents : un chêne peut en effet stocker du carbone pendant plusieurs siècles, d’après Jonathan Lenoir, chargé de recherche CNRS en écologie et biostatistiques, dont les propos ont été rapportés par France tv Info. Pourtant, les arbres les plus âgés sont aussi les plus résistants aux aléas climatiques 💪. 👉 Coupe rase des forêts, une aberration
De plus, l’entretien des forêts est de plus en plus mécanisé, ce qui tasse les sols et impacte leur capacité à stocker du CO2 : en effet, cela perturbe le fonctionnement des microorganismes, et influe sur la capacité d’infiltration de l’eau, et donc sur celle d’évapotranspiration des arbres. Et oui, le cycle de l’eau est un mécanisme très subtil qu’un rien peut chambouler. Enfin, les forêts sont plus fragmentées, et donc plus vulnérables, notamment aux changements de températures : la présence de gros massifs permet un effet de protection entre arbres.
Les forêts du Monde entier saturent, un signal d’alerte
Mais plus largement, il s’agit d’un problème qui ne s’arrête pas aux frontières : la partie brésilienne de la forêt amazonienne, par exemple, émet désormais du carbone 😱. A l’heure actuelle, seule la forêt tropicale du bassin du Congo en Afrique centrale constitue encore un important puits de carbone, en séquestrant 600 millions de tonnes de CO2 de plus qu’elle n’en émet chaque année, d’après une étude publiée dans la revue Nature Climate Change en 2021. Les forêts d'Asie du Sud-Est, au cours des vingt dernières années, sont devenues une importante source d'émissions de CO2, du fait de la déforestation dont elles sont victimes, des incendies, et du drainage des tourbières.
Planter des arbres, oui, mais préserver, c’est mieux !
Autrement dit, il ne suffit pas de planter des arbres pour lutter contre le réchauffement climatique, mais il convient d’engager une véritable réflexion sur la gestion des forêts et sur son adaptation aux conséquences du réchauffement climatique 🤔 : implantation des arbres, entretien des forêts, lutte contre les espèces exotiques envahissantes... Il est également démontré que les plantations des 20 dernières années ne représentent que 5% du puits de carbone représenté par l’ensemble des forêts mondiales, tandis que les zones protégées permettent de préserver le pouvoir de séquestration des forêts et abritent près de 30% de ce dernier.
👉 Les arbres pourraient réduire la mortalité liée aux canicules urbaines
À retenir Les forêts jouent un rôle primordial dans la régulation du climat : grâce au mécanisme de la photosynthèse, les végétaux absorbent du CO2 et le stockent ensuite. C’est ainsi que les couverts boisés figurent en tête, avec les océans, des plus puissants puits de carbone de la planète. Or, le dérèglement climatique atténue l’action des puits de carbone naturels, et notamment des forêts : sécheresses à répétition, incendies, ravageurs, prélèvements irraisonnés, déforestation… Un phénomène aussi préoccupant que sous-estimé qui conduit peu à peu les forêts à séquestrer de moins en moins de CO2, au point que certaines d’entre elles ont atteint un point de bascule et sont désormais devenues émettrices. Explorer - protéger - se ressourcer #BornToBeWild
|
Sources : reporterre.net, lemonde.fr, libération.fr, france3-regions.francetvinfo.fr, geo.fr, youmatter.world