E-book vs/ livre papier, un match serré !
Le marché du livre numérique, bien qu’encore marginal, est en plein boom et connaît une forte expansion, en particulier outre Atlantique. Mais qui, du livre papier ou du e-book, est le plus écolo ? Bien imprudent serait celui qui répondrait sans nuance à cette question !
En effet, la liseuse réduit de fait les besoins en papier, c’est vrai, et ne nécessite pas de transport non plus, ce qui réduit encore plus son empreinte environnementale. Mais de là à dire que le livre numérique est neutre pour la planète... Que nenni ! Le coût environnemental de la fabrication d’une liseuse est en réalité bien plus important que celle d’un livre papier 🙃. Mais d’un autre côté, on n’achète son e-book qu’une seule fois, et on peut ensuite y stocker des centaines de livres électroniques, contrairement au livre papier, avec lequel il faut compter sur un achat par ouvrage. OK, mais un livre se prête, s’échange, s’emprunte à la bibliothèque 🤯… Un match en réalité plus au coude à coude qu’il n’y paraît !
👉 Comment réduire son empreinte numérique en 14 étapes ?
Sur le terrain de l’empreinte carbone, un match difficile à arbitrer
On estime qu’un seul ouvrage papier engendre l’émission d’environ 7,5 kg d’équivalent carbone, sur l’ensemble de son cycle de vie, le transport étant le poste de dépense écologique le plus coûteux, depuis l’acheminement des matières premières jusqu’au transport final jusqu’aux plateformes logistiques de vente, si l’on en croit les estimations du cabinet de consultants Cleantech auprès de qui Amazon a passé commande il y a de ça quelques années 🤔. À côté de ça, l’analyse du cycle de vie d’une liseuse de type Ipad engendrerait l’émission d’environ 130 kg d’équivalent CO2, contre 168 kg pour un Kindle, d’après la même source.
👉 Le greenwashing, qu'est-ce que c'est ?
Des chiffres qui divergent en fonction des observateurs, car de son côté, le cabinet Carbone 4 (diligentée, cette fois-ci, par Hachette Livre 😅) estime que sur tout son cycle de vie, un ouvrage papier n’émet en fait qu’1 kg d’équivalent CO2, contre 250 kg pour un support numérique. Si ces évaluations sont exactes, il faudrait donc lire de manière plus qu’intensive pour espérer, un jour, compenser le bilan carbone de l’e-book par rapport à un support papier.
Quoi qu’il en soit, on observe surtout que trouver une étude réellement impartiale sur la question n’est pas chose aisée ! C’est pourquoi il demeure difficile d’évaluer précisément le seuil de lecture à partir duquel une liseuse est réellement « rentabilisée » d’un point de vue environnemental. Si l’on se place dans la situation du lecteur français moyen assidu, qui s’offrirait, d’après Hachette, environ 4,5 livres par an, il faudrait donc, en fonction des évaluations, entre 5 et… 50 ans pour que l’opération devienne vertueuse 😱. Avec une durée moyenne d’utilisation de 4 ans pour un iPad, on est bien avancés.
👉 Papier ou numérique ? Qui est le plus écologique ?
Le livre électronique, plus économe en eau ?
D’un autre côté, sur le terrain de la consommation en eau, le point va plutôt à la liseuse électronique. Il faut presque 30 litres d’eau pour confectionner un livre papier, quand la fabrication d’un e-book ne demande qu’environ 500 ml d’eau. Dans certains pays comme le Brésil où l’eucalyptus, dont les fibres donnent un papier plus résistant, est cultivé pour nos besoins, la consommation d’eau est telle que les agriculteurs alentour en sont privés, et se déplacent en grignotant la forêt, ce qui participe indirectement mais activement à la déforestation 🪵 🪓. Malgré les efforts des fabricants pour réduire cet impact écologique, il est réel et important.
Néanmoins, la quantité d’eau utilisée dans le cadre de l’extraction des matières premières nécessaires à la confection d’une liseuse n’est pas du tout transparente, et il est bien difficile de l’évaluer. La pollution de l’eau, notamment, serait massive en raison des produits hautement toxiques utilisés.
👉 L’empreinte eau, ou eau virtuelle : le concept
Côté matière première et déforestation, ça se discute !
En fait, une grosse proportion de l’empreinte environnementale du livre papier est imputable à la fabrication du papier et de la pâte à papier. D’après l’Ademe, l’industrie de l’édition engloutit tout de même à elle seule 20 millions d’arbres, dont 20% proviendraient de la déforestation de forêts anciennes ou primaires. Il faut néanmoins relever que dans notre pays, le bois utilisé est de plus en plus souvent issu de forêts certifiées. Néanmoins, la certification PEFC, par exemple, dont serait issue la grande majorité du papier acheté par les éditeurs français, est controversée par un certain nombre d’associations, telles que Greenpeace, WWF et Les Amis de la Terre.
De plus, le Bureau d’analyse sociétale pour une information citoyenne (Basic), à l’issue d’une étude menée en 2017, relève que l’industrie papetière a délocalisé sa production de bois et de pâte à papier vers des pays aux coûts de production plus bas, moins respectueuse des normes environnementales. Le Brésil, notamment, était alors le premier exportateur de pâte à papier vers la France. On se doute du résultat : monoculture, déforestation, appauvrissement des sols, pesticides… Rien de bien réjouissant pour la biodiversité ! 👉 Coupe rase des forêts, une aberration
Par ailleurs, la fabrication du papier est un processus polluant, qui nécessite l’utilisation de colles, de colorants, d’agents de résistance, de chlore… L’encre utilisée, peut également être une source importante de pollution, notamment si elle n’est pas végétale, ou lorsqu’elle est confectionnée à partir d’huile de palme 🌴.
🌳 D’un autre côté, le bois est une ressource renouvelable, contrairement aux matériaux utilisés pour la confection d’une liseuse… Il faut également souligner que le papier est entièrement recyclable ♻️, et à plusieurs reprises, ce qui allège considérablement la consommation de bois.
En comparaison, le livre numérique n’est aucunement recyclable, et nécessite, d’une part, l’utilisation de matériaux chimiques à fort impact environnemental, pour la confection notamment de batteries au lithium, et d’autre part, l’extraction de minerais précieux (cuivre, or, coltan, aluminium, terres rares…). On en revient donc à la déforestation, puisque l’exploitation minière en est l’une des sources majeures, notamment de destruction des forêts tropicales… ⚠️ Affirmer, donc, que l’utilisation de la liseuse préserve de la déforestation comparativement au livre papier n’est donc pas si exact. Pour parfaire le tableau, il ne faut pas perdre de vue que certains minerais proviennent de zones de conflits, financent des guerres, encouragent le travail des enfants…
La durée de vie, victoire par KO du livre papier
Le e-book dépasse rarement les 10 ans d’utilisation, contrairement au livre papier qui a une durée de vie presque illimitée, et des exemplaires âgés de plusieurs siècles admirablement conservés jusqu’à aujourd’hui en attestent ! La fin de vie du livre papier est plus vertueuse également, puisqu’il pourra être recyclé, contrairement à la tablette.
👉 Green IT, le numérique responsable, qu'est-ce que c'est ?
À retenir Sur le papier, donc (🤭), il semblerait que tout compte fait, ce soit plutôt le livre traditionnel qui soit le support de lecture le moins néfaste pour la planète, en particulier si le papier utilisé est issu de la filière de recyclage (fait rare, néanmoins, car les fibres s’abîment au cours du processus de sorte que les éditeurs privilégient bien souvent l’utilisation de papier de meilleure qualité). Il faut savoir également que le format « livre de poche » nécessite environ 37% de papier en moins qu’un livre classique. De même eu lieu d’acheter, on peut l’emprunter, l’échanger, le prêter… C’est le gros avantage du livre papier sur la liseuse, la mutualisation ! En 2021, 17 % des sondés déclaraient lire des livres sur des écrans numériques. Pourtant, l’intérêt écologique d’une liseuse n’a une chance de se justifier qu’à partir d’un très grand nombre de livres neufs en grands formats lus chaque année, et uniquement à condition de garder l’appareil plusieurs années, sans qu’il soit possible de chiffrer précisément le seuil minimal à atteindre : autrement dit, à moins d’être un très gros boulimique de lecture, ce qui est loin d’être le cas de la moyenne de la population, l’achat d’un e-book ne se justifie pas d’un point de vue strictement écologique. Explorer - protéger - se ressourcer #BornToBeWild
|
Sources : consoglobe.com, reporterre.net, cairn.info, mtaterre.fr, radiofrance.fr, youmatter.world