Il est l’or de changer d’or, monseignor #lafoliedesgrandeurs
Deux fois par an on se soumet à la même gymnastique :
- Le passage à l’heure d’été, qui intervient le dernier dimanche du mois de mars à 2 heures du matin, et qui a pour but de maximiser la lumière naturelle du soleil 🌞 : à cette occasion, on avance l’horloge d’une heure, et on perd donc une heure de sommeil.
- Et le passage à l’heure d’hiver, 6 mois plus tard, le dernier dimanche d’octobre à 2 heures du matin : à l’inverse, on recule l’horloge d’une heure, et on gagne une heure de sommeil sur cette nuit-là 😴.
Il était une fois le changement d’heure
Quelle drôle d’idée, n’est-ce pas 🤔 ? L’objectif, à la base, c’est de maximiser l’éclairage naturel en soleil lorsque les jours s’allongent au printemps, et se raccourcissent à l’automne. En optimisant cet éclairage naturel, on cherche à faire des économies d’énergie.
🤓 À l’origine, alors que le charbon était notre principale source d’énergie et que les ressources ont commencé à manquer au lendemain de la Première Guerre mondiale, l’Allemagne tente la première l’expérience du changement d’heure dès 1916. Les Etats-Unis leur emboîtent le pas à partir de 1918. Et de fil en aiguille, la majeure partie de l’Amérique du Nord, de l’Europe, de la Nouvelle-Zélande, ainsi que quelques régions du Moyen-Orient se laissent tenter.
La France fait ensuite marche arrière après la Libération en 1944, le changement d’heure étant finalement réinstauré par Valéry Giscard d’Estaing en 1976 pour des raisons économiques, suite au choc pétrolier de 1973 dû à la guerre du Kippour. Compte tenu du prix du baril de pétrole et du fait qu’à l’époque, l’électricité était principalement produite par le fioul, il est décidé de réduire la consommation de cette énergie, et donc de limiter le recours à la lumière électrique en essayant de rapprocher et de faire coïncider les heures d’ensoleillement avec le rythme de vie des Français 💡.
👉 Une heure d’été est donc réinstaurée avec deux heures de décalage par rapport à l'heure de son fuseau horaire (Temps moyen de Greenwich : GMT+2), tandis que l’heure d’hiver reste fixée à GMT+1. Une mesure qui se voulait provisoire mais qui est encore d’actualité.
Pourquoi une telle variation de la durée du jour ?
D’où viennent ces variations saisonnières de la longueur des journées ? La Terre est en rotation inclinée 🌍, c’est-à-dire qu’elle tourne autour de son axe en suivant une inclinaison d’environ 23,4 degrés par rapport à sa trajectoire autour du Soleil. Du coup, au niveau de l’Equateur, ça ne varie pas tellement : on a environ 12 heures de jour et 12 heures de nuit toute l’année. Mais plus on s’en éloigne, plus la luminosité varie.
C’est pourquoi en été, l’hémisphère nord connaît plus de luminosité, car c’est le moment où il s’incline vers le Soleil. Les journées sont plus chaudes et plus longues : les conditions sont idéales pour commencer à faire chauffer le barbecue 😎 ! Côté hémisphère sud, c’est l’exact opposé. Et inversement 6 mois plus tard.
Une habitude contestée
Mais cette pratique demeure très contestée et plutôt impopulaire : globalement, ça gonfle tout le monde, il faut bien le dire 🙄, et les Français sont majoritairement favorables à son arrêt. D’autant qu’elle ne serait pas sans effet sur la santé. Une consultation citoyenne européenne a révélé en 2019 que plus de 80% des 4,6 millions de personnes y ayant participé étaient contre… On peut donc légitimement se demander s’il ne serait pas l’heure de songer à arrêter.
Les méfaits sur la santé du changement d’heure : mythe ou réalité ?
Il est à peu près admis par tous que le changement d’heure perturbe notre horloge interne qui a besoin de quelques jours pour se resynchroniser. C’est d’autant plus évident chez les tout-petits, et chez les animaux (pour la traite des vaches, notamment 🐮).
L’horloge biologique, qui contrôle nos rythmes quotidiens, est un peu perdue pendant les quelques jours qui suivent le changement d’heure : elle suit un rythme de 24 heures, le rythme circadien, sur lequel reposent beaucoup de nos fonctions biologiques : notre système veille/sommeil, notre température, notre appétit, notre production hormonale ou encore notre fonctionnement cognitif. Par conséquent, si notre horloge interne déraille, nos fonctions biologiques aussi. Ainsi, si le changement se fait la plupart du temps sans encombre, les personnes qui y sont sensibles peuvent en pâtir :
- Les accidents mortels de la route seraient augmentés de 6% dans les jours suivant le passage à l’heure d’été aux USA, tendance confirmée par d’autres études 🚑 : les conducteurs prendraient plus de risques, et auraient des temps de réaction plus longs. Ce point est néanmoins contesté par la Commission européenne, qui relève dans son rapport de 2014 des résultats contradictoires d’une étude à une autre.
- Le changement d’heure peut induire des troubles du sommeil et de la vigilance, voire des dépressions et des suicides.
- Le risque de crises cardiaque serait également plus important lors du passage à l’heure d’été : il serait augmenté de 25% le lundi qui suit le changement 💓 !
Des hypothèses toutefois nuancées par la Commission européenne, qui conclut à un manque de preuves concernant les effets globaux sur la santé du changement d’heure. Néanmoins, la consommation de tranquillisants serait tout de même augmentée de 19% au moment du changement d’heure, d’après les constatations des médecins…
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Question économie d’énergie, est-ce vraiment efficace ? Remettons les pendules à l’heure…
La question mérite d’être posée. En fait, la réponse dépend de la zone géographique concernée. En effet, chaque contexte est unique, et dépend du climat, de l’isolation des logements, de l’équipement des ménages, notamment concernant la clim… Il n’est pas possible de généraliser. Les études menées aux Etats-Unis ont globalement remis en cause l’efficacité du procédé. À l’inverse, la Norvège et la Suède ont constaté de réelles économies d’énergie grâce au changement d’heure bi annuel 💪.
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En ce qui concerne la France, une étude de l’Ademe a démontré que le passage à l’heure d’été entraîne une plus forte consommation d’électricité le matin, avec un pic à 6 heures, mais une consommation bien moins importante le soir notamment entre 20 heures et 21 heures. L’un dans l’autre, on s’y retrouve, car les économies réalisées le soir compensent largement le pic de consommation du matin.
Résultat : Le changement d’heure permettait d’économiser en éclairage l’équivalent de la consommation annuelle d’environ 800 000 ménages, évitant 44 000 tonnes de CO2 supplémentaire 👏. Résultat modeste, certes, mais il n’y a pas de petit geste en matière d’économie d’énergie et de CO2. Pourquoi pas plus ? Parce que l’éclairage public a été beaucoup modernisé et consomme de moins en moins d’énergie. L’économie tournerait ainsi autour de 0,5% à 2,5% selon les pays.
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L’argument n°1 des défenseurs du changement d’heure
Plus encore que les économies d’énergie, le passage à l’heure d’été est bien souvent apprécié en raison du temps supplémentaire qu’il offre pour s’adonner à des activités après sa journée de travail, le soir.
Une liberté et un avantage certain dont de nombreuses personnes auraient bien du mal à se priver : une sortie au parc ou en forêt avec les enfants, un petit verre en terrasse d’un troquet, une séance de jogging 😎… C’est quand même plus agréable – et bien meilleur pour la santé physique et mentale – que de rester avachi dans son canapé à regarder la télé.
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La fin du changement d’heure ? Encore faut-il se mettre d’accord !
L’Union Européenne a voté en 2019 la fin du changement d’heure obligatoire, et depuis, ma foi, ça patine un peu, il ne se passe pas grand-chose… Brexit, Covid-19… Nombreux sont les sujets qui volent la vedette à ce projet sans cesse repoussé, alors que la directive devait initialement être adoptée par le Conseil fin 2020, avant d’être transposée dans les Etats membres.
D’autre part, pour abandonner ce système, encore faut-il que les pays membres parviennent à s’accorder sur l’heure qui sera finalement conservée : resterons-nous à l’heure d’hiver ou à l’heure d’été ? Les avis sont divergents, et sclérosent la réforme : c’est le blocage. Il y a les pro-longues soirées printanières d’un côté, et les défenseurs du rythme biologique de l’autre…
Aux Etats-Unis, le choix pourrait se porter sur l’heure d’été à compter de l’année 2023, si l’on en croit le projet de loi « The Sunshine Protection Act » en attente de promulgation.
À retenir :
Depuis plusieurs années, le bruit court que le changement d’heure touche à sa fin, sans qu’on n’en voie jamais la couleur. Si cette mesure a été prise initialement pour faire des économies d’énergie, l’intérêt en la matière devient plus modeste. Défavorablement réputé pour son prétendu effet néfaste sur la santé, et sur l’augmentation des accidents de la route qu’il provoque, les Européens n’aiment pas le changement d’heure. Néanmoins, ils ne parviennent pas à se mettre d’accord : faudra-t-il rester à l’heure d’hiver ou à l’heure d’été ? Les partisans des deux bords s’affrontent, et dans ces conditions, il apparaît que le maintient du changement d’heure est paradoxalement la meilleure solution de contenter l’opinion publique… Après tout, en matière d’économie d’énergie et de CO2, il n’y a pas de petit geste.
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Sources : nationalgeographic.fr, caminteresse.fr, geo.fr, Ademe, vie-publique.fr, medisite.fr, lemonde.fr